Les déblais : des déchets pas comme les autres
En France, près de 320 millions de tonnes de déchets sont produits annuellement et parmi elles, 160 millions de tonnes sont des déblais. En effet, certaines opérations d’aménagement demandent de déconstruire l’existant (anciennes maisons, immeubles inhabités, etc.) pour créer de nouveaux quartiers. Cette déconstruction laisse des traces et surtout beaucoup de déblais issus des anciennes constructions.
Habituellement, les déblais sont évacués des chantiers pour être ensuite concassés dans des carrières en dehors de la ville. Cette gestion occasionne beaucoup d’aller-retours de camions et fait également sortir du site une matière qui serait potentiellement rachetée pour la suite des travaux. Les déblais ne sont pas des déchets comme les autres et sont souvent des matériaux nobles avec une véritable utilité. C’est pour cette raison que les aménageurs commencent à concevoir des opérations vertueuses mettant en œuvre les matériaux issus de la déconstruction : c’est ce qu’on appelle l’économie circulaire.
Une réponse logique aux nouveaux enjeux environnementaux
La loi Anti-Gaspillage pour une Économie Circulaire (AGEC), la loi Zéro Artificialisation Nette (ZAN) et d’autres réglementations préfigurent et impulsent de nouvelles gestions des chantiers pour notamment revaloriser les déblais.
« On est avant-gardiste sur la gestion des déblais de chantier. Depuis toujours, on évacuait des matériaux pour ensuite les racheter et les faire revenir. Cette logique n’a plus de sens aujourd’hui. Le monde de l’aménagement et du bâtiment évoluent à grande vitesse et nous nous adaptons constamment aux nouveaux enjeux sociétaux et environnementaux. Cette adaptation passe notamment par le réemploi des matériaux » affirme Mathieu Aldrin, Directeur d’agence du Crédit Mutuel Aménagement Foncier à Besançon.
Focus : L’écoquartier Vauban à Besançon (25)
Construit au tout début du XXème siècle, le site de la Caserne Vauban s’inscrit dans le premier cercle urbain périphérique de Besançon. Suite au départ de l’armée en 2006, la collectivité a souhaité valoriser ce patrimoine militaire d’une surface de 7 hectares afin d’y développer un écoquartier. Lauréat de la consultation d’aménageurs, le Crédit Mutuel Aménagement Foncier porte un projet innovant autour de la gestion des déblais de chantier.
Mathieu Aldrin, en charge de l’opération, raconte : « Après la déconstruction de 3 gros bâtiments, nous nous sommes retrouvés avec plus de 30 000 m³ de déblais sur le site. Au lieu de faire venir des camions pour récupérer tous ces matériaux, nous avons décidé de les faire concasser sur place pour ensuite les utiliser pendant les travaux. Environ 90% des déblais ont été réutilisés et de nombreux aller-retours de camions ont été ainsi évités. C’est un projet innovant qui nous a par ailleurs permis de garder l’âme du site. ».
Focus : Le Clos du Petit Saloir à Montfort-sur-Meu (35)
L’ancienne usine de salaison qui fonctionnait depuis une cinquantaine d’années à Montfort-sur-Meu, près de Rennes, a cessé son activité en 2017. Dans le cadre de la reconversion de cette usine, la collectivité de Montfort-sur-Meu avait dans un premier temps lancé des études pour aménager elle-même ce site. Face aux difficultés rencontrées, Montfort-sur-Meu a validé la proposition d’aménagement faite par Crédit Mutuel Aménagement Foncier en 2018. L’opération du « Clos du petit Saloir » compte 23 parcelles viabilisées de 249 à 643 m² pour la construction de logements individuels et d’un collectif.
Contrairement à certaines matières nobles, les déblais provenant de cette ancienne usine n’étaient pas prêts à l’emploi. Frédéric Garault, Directeur d’agence du Crédit Mutuel Aménagement Foncier à Rennes et en charge du projet, explique : « En achetant cette ancienne usine, on récupère tout ce qui va avec. À cause de l’utilisation de produits toxiques, certains déblais étaient pollués et inutilisables en l’état. Alors, en plus de la déconstruction, nous nous sommes occupés de la dépollution et du désamiantage. Cette nouvelle gestion des déblais de chantier impulse une logique vertueuse d’économie circulaire qui correspond aux nouveaux enjeux de nos métiers ».
Ce réemploi des matériaux existants implique une toute nouvelle façon de penser et d’appréhender la conception même d’un projet. « Ça va dans le sens de notre métier de demain, notamment avec la loi ZAN qui vise à réduire les opérations immobilières sur des terres agricoles. Les plus beaux fonciers sont aujourd’hui déjà construits, il faut maintenant reconstruire la ville sur la ville » ajoute Frédéric Garault.
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